Décryptage : être né en début d’année, un avantage scolaire ?
Une avance dans le développement socio-émotionnel
Avoir un an de moins à l’entrée à l’école peut avoir des conséquences sur toute la scolarité de l’enfant. Elles ne sont heureusement pas systématiques ni flagrantes, mais statistiquement significatives. Les élèves nés en début d’année seraient plus persévérants, plus sûrs d’eux, curieux, empathiques, contrôleraient mieux leurs émotions et leur résistance au stress que les élèves nés en fin d’année, a remarqué l’Insee à partir des résultats des dernières enquêtes Pisa, menées sur les élèves de 15 ans de 16 pays de l’OCDE*.
Avec des compétences psychosociales moins développées, les plus jeunes élèves de 15 ans seraient ainsi plus exposés au harcèlement scolaire. 20% de plus en France, l’une des moyennes les plus élevées.
Autre conséquence, les regards sur ces élèves génère un biais, car ils seraient surreprésentés à tort dans les diagnostics de troubles comme l’hyperactivité, « probablement parce qu’ils ont moins de capacité de concentration » souligne Pauline Givord, l’auteure du rapport.
Des résultats scolaires qui varient selon l’âge
Le mois de naissance impacte aussi les résultats scolaires. L’Insee a calculé une différence moyenne de 20 points au test Pisa en lecture, en mathématiques et en sciences entre les élèves jeunes et les plus âgés. Le rapport ajoute qu’« être plus âge d’un an a le même impact qu’avoir un an d’étude supplémentaire ». Ces inégalités selon l’âge sont toutefois « bien plus réduites que les inégalités de performance liées à l’origine sociale », relativise l’étude. En comparaison, 92 points séparent les élèves les plus favorisés des plus modestes.
Des facteurs aggravants en France
Les inégalités sociales auraient même tendance à exacerber les inégalités selon l’âge dans certains pays. C’est le cas de la France où les élèves nés en début d’année dans un milieu modeste ont une probabilité accrue de 17 points d’avoir redoublé à l’école primaire, contre 5 points pour les plus favorisés. En effet, les plus jeunes élèves, mais issus d’un milieu favorisé, bénéficient d’un « avantage familial compensatoire », c’est-à-dire que « l’investissement des parents aide à adoucir les conséquences négatives », indique Pauline Givord.
L’effet du mois de naissance est également amplifié par le redoublement, très pratiqué en France. Ainsi, être plus vieux d’un an à l’entrée à l’école réduit de plus de 10 points la probabilité de redoubler au primaire.
Pour réduire les inégalités, chaque pays a sa technique
Certains pays offrent aux parents plus de latitude pour retarder ou avancer l’entrée à l’école. Mais l’étude pointe un risque de creuser les inégalités sociales, comme en Italie, où les familles favorisées préfèrent inscrire leur enfant à l’école jeune pour le « stimuler ». C’est pourquoi les établissements autrichiens organisent des entretiens d’évaluation avec les familles pour décider ensemble du meilleur moment pour commencer l’école et proposent des programmes de transition pour ceux qui l’intègrent plus tôt. Une fois à l’école, les pays nordiques misent, les premières années, sur le développement des compétences psychosociales et sont plus souples sur les compétences académiques. Et pour corriger les biais liés à la maturité des élèves, l’Irlande organise ses tests standardisés selon l’âge des enfants.
* “How age at school entre affects future educational and socioemotional outcomes: Evidence from PISA”, Insee, juillet 2024
“Les effets du mois de naissance sur la réussite scolaire à 15 ans : une comparaison internationale”, Insee, septembre 2024